Ciel de Perdrix de Jiang Kui

zhe gu tian · yuan xi you suo meng
Le fleuve coule à l’est sans trêve;
Le flot n’emporte pas les graines d’amour semées
Dans nos cœurs.
Son visage paraissait vague dans mon rêve,
Mais le cri de l’oiseau m’a soudain réveillé,
Tout en pleurs.
Le printemps pas verdi.
Mes cheveux déjà gris,
Séparés si longtemps,
Nous ne sentons plus le chagrin intense.
Mais quand la fête vient an par an,
Chacun de nous sait ce que l'autre pense.

Poème chinois

「鹧鸪天 · 元夕有所梦」
肥水东流无尽期。当初不合种相思。
梦中未比丹青见,暗里忽惊山鸟啼。

春未绿,鬓先丝。人间别久不成悲。
谁教岁岁红莲夜,两处沉吟各自知。

姜夔

Explication du poème

Composé lors de la fête des Lanternes de 1197 (3e année de Qingyuan sous l'empereur Ningzong des Song), ce ci reflète la période de déclin des Song du Sud. Bien que la société jouisse d'une stabilité relative, les turbulences politiques et les revers personnels marquent profondément les lettrés. Jiang Kui, alors âgé et éprouvé par une carrière décevante, vit éloigné de sa bien-aimée depuis des années. Ce "Zhegutian - Rêve lors de la nuit yuánxiāo" naît de cette conjonction entre désillusion existentielle et nostalgie amoureuse.

Première strophe : « 肥水东流无尽期。当初不合种相思。梦中未比丹青见,暗里忽惊山鸟啼。 »
Féi shuǐ dōng liú wú jìn qī. Dāngchū bùhé zhòng xiāngsī. Mèng zhōng wèi bǐ dānqīng jiàn, àn lǐ hū jīng shān niǎo tí.
Les eaux grasses coulent vers l'est sans fin. N'aurais-je jamais dû laisser croître cet amour. Dans le rêve, moins distincte qu'en portrait, Soudain effarouchée par le cri d'un oiseau nocturne.

Le poète ouvre par la métaphore fluviale ("eaux grasses"), symbole de permanence qui contraste avec l'éphémère humain. Le pseudo-regret ("n'aurais-je jamais dû") dissimule en réalité une fidélité indéfectible. La comparaison entre vision onirique et portrait révèle l'idéalisation progressive de l'être aimé, tandis que l'oiseau nocturne incarne l'intrusion brutale du réel dans le songe.

Deuxième strophe : « 春未绿,鬓先丝。人间别久不成悲。谁教岁岁红莲夜,两处沉吟各自知。 »
Chūn wèi lǜ, bìn xiān sī. Rénjiān bié jiǔ bù chéng bēi. Shuí jiāo suì suì hónglián yè, liǎng chù chényín gèzì zhī.
Le printemps pas encore vert, Mes tempes déjà grises. À trop longtemps souffert, la douleur s'émousse. Qui donc nous impose, chaque fête des lanternes, Ces méditations parallèles, confidentes à nous seuls ?

Le parallèle entre la nature en retard ("printemps pas encore vert") et le vieillissement prématuré ("tempes grises") traduit une dissonance temporelle douloureuse. L'observation psychologique "la douleur s'émousse" dévoile le mécanisme de défense contre une souffrance devenue chronique. La référence aux lanternes rouges (红莲), traditionnelles pendant yuánxiāo, transforme la fête populaire en rappel cruel de la séparation, tandis que "méditations parallèles" suggère une communion transcendante par-delà la distance.

Lecture globale

Ce ci tisse le fil du rêve, entrelaçant réel et illusion, pour dépeindre une solitude présente, une joie onirique et la mélancolie du réveil. La strophe supérieure évoque la fugacité insaisissable du songe, tandis que l’inférieure expose l’amertume du réel et l’outrage du temps. Dans le rêve, l’aimée apparaît, moins distincte pourtant qu’un portrait ; sous les lanternes de lotus rouge, les mots se figent, intransmissibles. Le poète choisit la fête des lanternes comme cadre temporel, reliant deux cœurs séparés par la distance, créant une atmosphère à la fois tendre et nostalgique.

Spécificités stylistiques

D’une langue épurée mais chargée d’émotion, ce ci superpose rêve et réalité pour construire un monde de désir et de douleur. Jiang Kui excelle à exprimer des sentiments complexes par des allusions discrètes et des mots simples. Amour rêvé, chagrin présent et passage des saisons fusionnent en une œuvre où la souffrance se dissimule sous la grâce, laissant une résonance durable. Un modèle du genre élégiaque.

Éclairages

Ce ci révèle avec acuité l’impuissance face aux séparations prolongées et la ténacité de l’amour dans la mémoire. Il nous exhorte à chérir l’instant présent plutôt que de regretter, une fois l’adieu venu. Au milieu des lanternes flamboyantes et des réjouissances collectives, une âme demeure glacée — rappel poignant que « sous les fastes d’une époque, gît toujours la peine individuelle », thème intemporel de la condition humaine.

Traducteur de poésie

Xu Yuanchong(许渊冲)

À propos du poète

Jiang Kui

Jiang Kui​​ (姜夔, vers 1155 - 1221), originaire de Poyang dans le Jiangxi, fut un poète et musicien de la dynastie des Song du Sud. Bien que n'ayant jamais occupé de fonction officielle (布衣), il laissa une œuvre poétique d'une pureté aérienne et d'une sobriété élégante (清空峭拔). Avec Fan Chengda et Yang Wanli, il est considéré comme l'un des "Quatre Grands Maîtres de la Restauration" (中兴四大家).

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