Souvenir de la Capitale Impériale de Liu Yong

yi di jing · bo qin xiao zhen liang tian qi
La couverture mince et l’oreiller petit,
Par le froid qui s’en vient je me sens désolé
D’avoir dû te quitter.
Je me tourne et retourne au fond du lit,
Mais le sommeil me fuit
Bien que la nuit soit avancée.
Je me lève et me couche à n’en plus finir, la nuit
Est aussi longue qu'une année.

Oh! je voudrais m’en retourner chez toi.
Mais je suis loin, très loin déjà.
Mille pensées de toi ne me consolent pas.
Comme je me sens seul et las!
Mon cœur reste toujours attaché à ton cœur;
Je te dois un ruisseau de pleurs.

Poème chinois

「忆帝京 · 薄衾小枕凉天气」
薄衾小枕凉天气,乍觉别离滋味。
辗转数寒更,起了还重睡。
毕竟不成眠, 一夜长如岁。

也拟待却回征辔,又争奈已成行计。
万种思量,多方开解,只恁寂寞厌厌地。
系我一生心,负你千行泪。

柳永

Explication du poème

Ce ci est l'un des poèmes où Liu Yong exprime avec profondeur la nostalgie liée à la séparation amoureuse. L'auteur dépeint avec une touche délicate les sentiments de l'absence, utilisant un langage simple et des descriptions directes pour révéler ses émotions intimes, démontrant ainsi son style innovant et sa maîtrise exceptionnelle de l'art poétique. D'une sincérité touchante et d'une expression naturelle, cette œuvre au structure rigoureuse et progressive compte parmi ses créations les plus abouties de sa période de maturité.

Première strophe : « 薄衾小枕凉天气,乍觉别离滋味。辗转数寒更,起了还重睡。毕竟不成眠,一夜长如岁。 »
Báo qīn xiǎo zhěn liáng tiān qì, zhà jué bié lí zī wèi. Zhǎn zhuǎn shǔ hán gēng, qǐ le hái chóng shuì. Bì jìng bù chéng mián, yī yè cháng rú suì.
Sous une couverture légère, sur un petit oreiller, par ce temps frisquet,
Je ressens soudain le goût amer de la séparation.
Me tournant et retournant, je compte les veilles nocturnes,
Me levant pour me recoucher encore.
Finalement incapable de trouver le sommeil,
Une seule nuit me semble longue comme une année entière.

Le poète choisit avec justesse l'insomnie comme métaphore puissante de la douleur causée par la séparation. Les détails concrets et quotidiens - "couverture légère", "petit oreiller" - créent immédiatement une atmosphère de solitude et de froidure physique et morale. L'adverbe "soudain" saisit avec justesse l'irruption inattendue et incontrôlable du chagrin amoureux. Les verbes d'action "se tourner", "se lever" et "se recoucher" dépeignent avec vivacité l'agitation intérieure et l'impossibilité de trouver le repos. La conclusion frappante - "une nuit longue comme une année" - utilise l'hyperbole avec une retenue qui rend l'expression d'autant plus poignante, concentrant dans cette image simple toute l'intensité de la souffrance amoureuse.

Deuxième strophe : « 也拟待却回征辔,又争奈已成行计。万种思量,多方开解,只恁寂寞厌厌地。系我一生心,负你千行泪。 »
Yě nǐ dài què huí zhēng pèi, yòu zhēng nài yǐ chéng xíng jì. Wàn zhǒng sī liang, duō fāng kāi jiě, zhǐ nèn jì mò yàn yàn dì. Xì wǒ yī shēng xīn, fù nǐ qiān xíng lèi.
J'ai bien songé à retenir les rênes de mon cheval pour faire demi-tour,
Mais comment pourrais-je défaire ce voyage déjà entrepris ?
Mille et une réflexions,
D'innombrables tentatives d'apaisement,
Rien n'y fait, je demeure plongé dans cette morne solitude.
Mon cœur restera à jamais enchaîné à toi,
Alors que j'ai trahi tes mille et une larmes.

La seconde strophe bascule vers un dilemme existentiel plus profond. Le désir passionné de retour ("retenir les rênes") se heurte cruellement à l'implacabilité du destin ("voyage déjà entrepris"). L'accumulation "mille et une réflexions/d'innombrables tentatives" révèle avec force la vanité de toutes les tentatives de consolation et d'apaisement. Les deux derniers vers - devenus à juste titre célèbres - cristallisent le paradoxe déchirant au cœur du poème : la fidélité éternelle ("cœur à jamais enchaîné") ne peut empêcher la souffrance infligée ("mille et une larmes trahies"). Cette antithèse poignante entre amour profond et douleur inévitable constitue le sommet émotionnel du poème.

Appréciation globale

Ce poème lyrique prend pour point de départ une nuit blanche, déployant progressivement, à travers le fil conducteur des sentiments de séparation, les subtiles fluctuations et émotions authentiques du personnage. De l'éveil dû au froid initial, à l'insomnie persistante, puis à l'amertume du retour impossible, jusqu'à l'ultime déclaration d'amour profonde et de l'impuissance à y répondre, il dessine une courbe psychologique complète. L'auteur exprime des états émotionnels complexes et profonds à travers un langage oral simple et dépouillé, permettant au lecteur de s'immerger totalement et de résonner intensément avec le texte.

Caractéristiques stylistiques

  1. Langage naturel et dépouillé : Presque exempt d'ornements rhétoriques, mais d'une sincérité émouvante à chaque vers, rendant l'œuvre particulièrement touchante et proche.
  2. Structure progressive : Une évolution claire du ressenti du froid, à l'obsession de la séparation, puis à l'échec du retour souhaité, jusqu'à l'explosion émotionnelle finale, avec une logique limpide et un rythme fluide.
  3. Art du détail expressif : La description d'éléments comme la "couverture légère", le "petit oreiller" ou le "compte des veilles nocturnes" concrétise les émotions, les rendant palpables.
  4. Profondeur affective retenue : Sans jamais crier son "amour" ou sa "douleur", il exprime avec des phrases simples mais profondes les méandres infinis des sentiments.

Éclairages

Ce poème lyrique, à travers son langage simple dépeignant la nostalgie de la séparation, nous montre que l'expression des émotions ne dépend pas nécessairement de l'éclat rhétorique - la sincérité pure est la clé qui touche le cœur. Simultanément, il révèle les luttes déchirantes entre réalité et sentiments, nous rappelant de chérir l'instant présent et ceux que nous aimons, pour ne pas laisser se répéter la tragédie de "mon cœur à jamais enchaîné à toi, alors que j'ai trahi tes mille et une larmes". La tendresse profonde et l'expression authentique qui s'en dégagent comptent parmi les émotions les plus bouleversantes de la poésie lyrique classique chinoise.

Traducteur de poésie

Xu Yuanchong(许渊冲)

À propos du poète

Liu Yong

Liu Yong (柳永), vers 987 - 1053 après J.-C., était l'un des poètes les plus renommés du monde littéraire du début de la dynastie des Song du Nord. Les poèmes de Liu Yong avaient une grande portée et étaient largement diffusés.

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