La Nostalgie de Li Gou

xiang si · li gou
On dit que le soleil se couche au bout du monde;
Je peux le voir mais ma maison n'est pas en vue.
Je m'en suis séparé par les monts et les ondes,
Et les monts sont encore voilés par la nue.

Poème chinois

「乡思」
人言落日是天涯,望极天涯不见家。
已恨碧山相阻隔,碧山还被暮云遮。

李觏

Explication du poème

Ce poème, Nostalgie du pays natal, est une œuvre lyrique du penseur et poète des Song du Nord Li Gou, exprimant la mélancolie d'un fonctionnaire en poste loin de sa terre natale. Le poème fusionne l'éloignement spatial et les obstacles visuels, utilisant comme images le soleil couchant, les montagnes bleues et les nuages du crépuscule pour déployer une nostalgie intense et profonde. D'une conception ingénieuse et d'une portée émotionnelle remarquable, ce poème est un chef-d'œuvre représentatif de sa poésie sentimentale.

Premier couplet : « 人言落日是天涯,望极天涯不见家。 »
Rén yán luòrì shì tiānyá, wàng jí tiānyá bùjiàn jiā.
On dit que là où tombe le soleil commence l'horizon,
Mais quand mes yeux en explorent l'extrémité, ma terre natale reste invisible.

Le poète emprunte l'expression populaire « le soleil couchant marque le bout du monde » pour introduire son thème, projetant son désir de retour vers l'horizon lointain où le soleil se noie. Le coucher du soleil, symbole traditionnel du retour au foyer, devient ici source d'amertume : bien que le poète fixe l'horizon, il ne voit que l'« infini » et jamais sa maison. Cette frustration visuelle intensifie l'âpreté de sa nostalgie. En deux vers seulement, Li Gou transmet avec profondeur le sentiment de perte et la distance insurmontable.

Second couplet : « 已恨碧山相阻隔,碧山还被暮云遮。 »
Yǐ hèn bì shān xiāng zǔgé, bì shān hái bèi mù yún zhē.
Déjà je maudissais ces monts bleus faisant écran,
Les voilà maintenant que les nuages du soir enveloppent !

Ces deux vers passent du lointain au proche, précisant la raison concrète de cette « invisibilité » : les montagnes bleues bloquent le chemin, et ces mêmes montagnes sont voilées par les « nuages du crépuscule ». L'expression « déjà je maudis » révèle une amertume latente, tandis que « et voilà que » accentue le ressentiment, multipliant les obstacles comme autant de couches oppressantes. Les montagnes bleues, pourtant simples éléments naturels, deviennent dans l'esprit du poète des barrières infranchissables, et les nuages sombres ajoutent une obscurité symbolique. Cette transition d'images visuelles, du clair à l'obscur, reflète l'évolution émotionnelle : de la nostalgie à la souffrance, puis de la souffrance au ressentiment.

Lecture globale

Ce poème déploie progressivement le thème de l'« impossibilité de voir sa terre natale », partant du soleil lointain pour aboutir aux montagnes proches, puis aux nuages du crépuscule qui les recouvrent. La structure spatiale passe ainsi du lointain au proche, tandis que l'émotion s'intensifie, traçant une trajectoire psychologique complète. « On dit que le soleil couchant marque le bout du monde » exprime l'espoir ; « en scrutant cet horizon, je ne vois point ma terre natale » traduit la déception ; « déjà je maudis ces monts bleus » introduit le ressentiment ; et « les nuages du soir les enveloppent encore » accentue l'impuissance. Ces quatre vers, avançant pas à pas, décrivent naturellement l'évolution de la nostalgie : de l'espoir à l'obstacle, puis au désespoir. Bien que bref, le poème possède une force expressive remarquable, avec une mélancolie profonde et une résonance infinie.

Spécificités stylistiques

Ce poème est d'une conception rigoureuse et d'une progression claire, avec un langage concis mais une portée profonde. Le premier vers cite une expression populaire pour créer une résonance immédiate, puis bascule rapidement dans la déception, produisant un contraste émotionnel saisissant. Le poète utilise habilement le mot « bleu » (碧) pour évoquer la lourdeur des montagnes, leur attribuant ainsi une charge psychologique : elles ne sont plus seulement des obstacles naturels, mais aussi des barrières émotionnelles. Le verbe « scruter » (望) traverse tout le poème, liant intimement les obstacles spatiaux et l'intensification des sentiments. L'émotion évolue avec le paysage, et le paysage reflète l'émotion, formant une structure lyrique classique de « vision impossible ». Le dernier vers, « les nuages du soir les enveloppent encore », condense une émotion à son paroxysme, révélant la profondeur de la nostalgie.

Éclairages

En seulement quatre vers, Li Gou exprime une nostalgie qui s'intensifie progressivement, devenant obsédante. Ce poème nous enseigne que la poésie la plus touchante naît souvent des émotions les plus profondes. Pour celui qui est loin de chez lui, la terre natale n'est pas seulement un lieu géographique, mais aussi une attache spirituelle. Lorsque les obstacles physiques sont amplifiés par l'émotion, la nostalgie devient encore plus douloureuse. Le poète utilise le paysage pour porter le sentiment, voyant le grand dans le petit, nous rappelant ainsi que la sincérité de l'émotion et la retenue de l'expression peuvent éveiller les résonances les plus profondes de l'âme.

Traducteur de poésie

Xu Yuanchong(许渊冲)

À propos du poète

Li Gou (李觏, 1009 - 1059), philosophe, penseur, éducateur et réformateur de la dynastie des Song du Nord. Vivant à une époque de déclin et de faiblesse nationale, bien que issu d'un milieu modeste, il se consacra avec ardeur à l'étude pour servir son pays et son peuple. Brillant dialecticien et écrivain talentueux, il échoua au concours des talents exceptionnels mais se consacra à l'enseignement, attirant des dizaines, voire des centaines d'étudiants.

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