La Pavillon des Hirondelles I de Zhang Zhongsu

yan zi lou i
La lampe avec le givre scintille dans l’ombre,
De son lit se lève la veuve solitaire.
Toute nuit elle est perdue dans sa pensée sombre;
Qui durera aussi longtemps que ciel et terre.

Poème chinois

「燕子楼 · 其一」
楼上残灯伴晓霜,独眠人起合欢床。
相思一夜情多少,地角天涯未是长。

张仲素

Explication du poème

Premier volet d'une trilogie de Zhang Zhongsu, ce poème donne voix à Guan Panpan, veuve retirée depuis dix ans dans le Pavillon des Hirondelles après le décès de son époux. Il capture un matin particulier parmi ses innombrables nuits solitaires, dépeignant à travers des images épurées et une émotion contenue sa fidélité indéfectible.

Premier distique : « 楼上残灯伴晓霜,独眠人起合欢床。»
lóu shàng cán dēng bàn xiǎo shuāng, dú mián rén qǐ hé huān chuáng.
Dans la tour, une lampe mourante accompagne le givre matinal,
La dormeuse solitaire se lève du lit des noces.

L'ouverture établit une atmosphère de solitude glaciale : la "lampe mourante" (残灯) trahit une nuit blanche, tandis que le "givre matinal" (晓霜) intensifie la froideur ambiante. Le verbe "accompagner" (伴) opère une personnification pathétique, transformant la lampe en dernier compagnon. Le "lit des noces" (合欢床), autrefois symbole d'union, devient ici le théâtre cruel de la solitude, soulignant le paradoxe entre mémoire conjugale et présent désolé.

Deuxième distique : « 相思一夜情多少,地角天涯未是长。»
xiāng sī yī yè qíng duō shǎo, dì jiǎo tiān yá wèi shì cháng.
Nuit de nostalgie - combien pèse un tel amour ?
Les confins du monde semblent alors proches.

Ce distique condense l'essence du chagrin. La question rhétorique sur le "poids de l'amour" (情多少) transforme une nuit particulière en synecdoque de dix années de veuvage. La comparaison avec les "confins du monde" (地角天涯) inverse magistralement les perspectives : l'éloignement géographique paraît dérisoire face à l'abîme infranchissable que crée la mort. L'emploi de "sembler" (未是) introduit une ironie tragique.

Lecture globale

Le poème s'ouvre sur une lampe résiduelle au petit matin et le givre de l'aube, utilisant des scènes concrètes pour refléter l'état d'âme du personnage. Bien que la détresse ne soit pas explicitement décrite, le simple détail de se lever seule du "lit de l'union joyeuse" exprime pleinement ses tourments nocturnes et sa solitude après la perte du compagnon. Les deux derniers vers transforment ce silence visuel en éruption émotionnelle, dépeignant la profondeur du regret amoureux et la persistance du sentiment à travers une métaphore à la fois juste et riche de sens. D'une structure serrée et d'un langage condensé, le poème utilise une seule nuit de paysage et d'émotion pour refléter dix années de fidèle attente, mêlant douleur sans amertume et tristesse empreinte de force, dans une lecture profondément émouvante.

Spécificités stylistiques

  • Expression des sentiments à travers le paysage : La lampe mourante, le givre matinal, le lit conjugal - ces images décrivent autant la réalité qu'elles suggèrent l'émotion, intensifiant la tension expressive.
  • Structure dense et progression graduelle : De l'insomnie à l'aube, de l'aube au regret amoureux, puis à l'infini, les sentiments s'approfondissent par strates avec une puissante force émotionnelle.
  • Langage suggestif, émotion contenue : Sans un seul mot comme "larme", "haine" ou "chagrin", chaque vers exhale pourtant la nostalgie, particulièrement dans le dernier vers où réel et imaginaire s'entrelacent en une résonance prolongée.

Éclairages

Ce poème illustre l'art classique de "voir le grand dans le petit" et de "décrire dix années en une nuit", condensant en une silhouette solitaire au petit matin des années de fidèle attente. Il nous enseigne que les émotions véritablement profondes résident moins dans l'expression bruyante de la douleur que dans la persistance et la dignité contenues dans le calme. La figure féminine de Guan Panpan incarne l'idéal lettré de fidélité inaltérable, tandis que Zhang Zhongsù, par sa voix, donne à voir la force et la grâce mélancolique de l'âme féminine, insufflant à la "Tour des Hirondelles" - cet archétype littéraire - une puissance émotionnelle bouleversante.

Traducteur de poésie

Xu Yuanchong(许渊冲)

À propos du poète

Zhang Zhongsu (张仲素), vers 769 - 819 après J.-C., était un poète de la dynastie Tang, originaire de Suzhou, dans la province de l'Anhui, et diplômé en 798. Zhang Zhongsu s'est spécialisé dans les poèmes lefu, et était doué pour décrire l'état d'esprit d'une femme pensante. Il a également écrit quelques poèmes frontaliers qui glorifiaient l'esprit combatif des gardes-frontières.

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