Parfum Plein la Cour de Qin Guan

man ting fang · shan mo wei yun
Les montagnes ceintes de nuages légers
Dont les herbes fanées s’estompent sur les cieux,
Le son du cor s’éteint sur la tour du clocher.
J’arrête mon bateau
Pour boire la coupe de l’adieu.
Que de choses du passé dans les Trois Collines
Dont le souvenir s’efface
Comme le temps brumeux.
Sans laisser de trace!
Par-delà le soleil qui décline
S’éparpillent mille corbeaux;
Un ruisseau serpente autour d’un hameau.

Mon cœur se brise en me rappelant cette heure
Où tu as dénoué ta ceinture
Et délié ta jupe encore pure.
Il ne reste aujourd’hui que mon renom
De galant sans cœur dans la Maison
De Fées où tu demeures.
Une fois parti, quand pourrai-je te revoir?
En vain les pleurs que notre cœur épanche
Ont-ils mouillé nos manches.
Comment mes entrailles ne se déchirent-elles
Pas en voyant de loin les lumières du soir
Sans trouver celle de ma belle!

Poème chinois

「满庭芳 · 山抹微云」
山抹微云,天连衰草,画角声断谯门。暂停征棹,聊共引离尊。多少蓬莱旧事,空回首、烟霭纷纷。斜阳外,寒鸦万点,流水绕孤村。
销魂当此际,香囊暗解,罗带轻分。谩赢得、青楼薄幸名存。此去何时见也?襟袖上、空惹啼痕。伤情处,高城望断,灯火已黄昏。

秦观

Explication du poème

Ce poème lyrique est l'une des œuvres les plus emblématiques de Qin Guan (Shaoyou), poète de la dynastie des Song du Nord. Centré sur un adieu à une chanteuse de Yue, il fusionne expérience personnelle et désillusion politique. Sous les apparences d'une séparation amoureuse se cachent les regrets du poète face à une carrière contrariée et à la fugacité de l'existence.

Première strophe : « 山抹微云,天连衰草,画角声断谯门。暂停征棹,聊共引离尊。多少蓬莱旧事,空回首、烟霭纷纷。斜阳外,寒鸦万点,流水绕孤村。 »
Shān mǒ wēi yún, tiān lián shuāi cǎo, huà jiǎo shēng duàn qiáo mén. Zàn tíng zhēng zhào, liáo gòng yǐn lí zūn. Duō shǎo péng lái jiù shì, kōng huí shǒu, yān ǎi fēn fēn. Xié yáng wài, hán yā wàn diǎn, liú shuǐ rào gū cūn.
Des monts estompés de nuages légers,
Un ciel marié aux herbes fanées,
Le son du cor se brise aux portes de la cité.
Suspendant l'aviron du départ,
Nous vidons ensemble la coupe de l'adieu.
Combien de souvenirs pétrifiés en îles Penglai,
Vains retours au passé – brumes éparses.
Au-delà du soleil couchant,
Des milliers de corbeaux transis,
Une rivière enlace un hameau solitaire.

Cette strophe ouvre sur un paysage pictural où « monts estompés de nuages » (山抹微云) – quatre caractères célébrés pour leur touche de pinceau à la fois légère et mélancolique – instaurent une atmosphère crépusculaire. Herbes fanées et son de cor décousu peignent la désolation des adieux. L'évocation des « îles Penglai » (mythe taoïste des îles Bienheureuses) transforme les souvenirs en mirages, tandis que corbeaux et hameau solitaire (écho délibéré au Tianjing sha de Ma Zhiyuan) cristallisent l'isolement du voyageur. Une fusion parfaite de scène et de sentiment.

Deuxième strophe : « 销魂当此际,香囊暗解,罗带轻分。谩赢得、青楼薄幸名存。此去何时见也?襟袖上、空惹啼痕。伤情处,高城望断,灯火已黄昏。 »
Xiāo hún dāng cǐ jì, xiāng náng àn jiě, luó dài qīng fēn. Màn yíng dé, qīng lóu bó xìng míng cún. Cǐ qù hé shí jiàn yě? Jīn xiù shàng, kōng rě tí hén. Shāng qíng chù, gāo chéng wàng duàn, dēng huǒ yǐ huáng hūn.
L'âme se dissout en cet instant,
Le sachet de soie se défait en secret,
La ceinture de gaze se sépare sans bruit.
En vain j'emporte
Le nom d'"ingrat des maisons vertes".
Quand nous reverrons-nous ?
Sur ma manche,
Seules traces de larmes inutiles.
L'heure la plus douloureuse :
La cité haute disparaît au regard,
Les lanternes s'allument dans le crépuscule.

Ici, l'émotion atteint son paroxysme. « L'âme se dissout » (销魂) joue sur la double blessure – amoureuse et politique. Le geste silencieux du sachet et de la ceinture dénoués est plus éloquent qu'une scène de larmes. L'autodérision (« ingrat des maisons vertes ») emprunte à Du Mu (poète Tang) pour exprimer remords et résignation. La chute, avec la ville disparue et les lanternes du soir, condense en une image toute la mélancolie du poète, laissant résonner l'indicible.

Lecture globale

Ce ci déploie une esthétique du dépouillement : paysages en demi-teinte (monts nuageux, herbes fanées) et gestes intimes (sachet défait) portent l'émotion à son comble. La structure épouse le mouvement d'un regard – de l'horizon lointain aux larmes sur la manche – pour aboutir à l'effacement final (ville/soir). Chef-d'œuvre de l'école « délicate et retenue » (婉约), il transcende le thème amoureux par une méditation sur l'impermanence.

Spécificités stylistiques

  1. Picturalité poétique : Les « monts estompés » et « corbeaux transis » relèvent de la technique du shanshui (peinture de paysage).
  2. Allusions savantes : La référence à Du Mu et aux îles Penglai enrichit le texte d'une profondeur historique.
  3. Économie expressive : Le non-dit (adieux sans paroles) et les symboles (crépuscule = fin d'une ère) priment.
  4. Architecture circulaire : Le poème s'ouvre et se clôt sur des images de déclin (herbes fanées → lanternes du soir).

Éclairages

Ce poème transforme l'échec personnel en objet de beauté. Il rappelle que les séparations (amoureuses, professionnelles) peuvent devenir des creusets de création. La mélancolie, ici, n'est pas stérile : par le travail du langage, elle accède à une forme de transcendance. Une leçon pour notre époque, où l'expression artistique reste un antidote à la désillusion.

Traducteur de poésie

Xu Yuanchong(许渊冲)

À propos du poète

Qin Guan

Qin Guan (秦观), 1049 - 1100 après J.-C., était originaire de Gaoyou, dans la province du Jiangsu. Qin Guan a eu une vie difficile et a écrit des poèmes anciens et lourds, profondément touchants en référence à sa vie. Su Shi appréciait le talent de Qin Guan et le louait comme ayant le même talent que Qu Yuan.

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