Bambou de Xuanzhou : Le Vent sur le Lac de Lü Benzhong

xuan zhou zhu · xiao xi peng di hu feng zhong
Sous les roseaux du ruisseau, le vent du lac est lourd,
Il brise la glace et met l’eau en mouvement.

Une branche de bambou se reflète, profonde devant la porte de Yu,
Froide et silencieuse, son parfum flotte dans la clarté lunaire.

Déjà mince et léger, qui pourrait l’accompagner ?
Son âme erre autour de Xu Xi…

Elle a honte d’être comme les pêchers, prisonniers de leur beauté printanière,
Préférant s’épanouir sous la plume du peintre, dans la pluie et les nuages.

Poème chinois

「宣州竹 · 小溪蓬底湖风重」
小溪蓬底湖风重。吹破凝酥动。
一枝斜映庾门深。
冷淡无言香泛、月华清。

已经轻瘦谁为共。魂绕徐熙□。
耻同桃李困春容。肯向毫端开发、雨云中。

吕本中

Explication du poème

Ce poème lyrique (ci) de Lü Benzhong prend le bambou pour thème, dépeignant les bambous de Xuanzhou comme une allégorie de ses propres aspirations morales et de son refuge spirituel. Les lettrés des Song vénéraient traditionnellement le prunier, l'orchidée, le bambou et le chrysanthème comme les "Quatre Nobles Plantes", symboles de vertu intègre. Lü Benzhong, ayant vécu sous les Song du Sud repliés au sud du Yangzi après les invasions, marqué par les guerres et l'exil, célèbre souvent dans ses œuvres l'intégrité, la fierté solitaire et le refus de se plier aux puissants. Ce poème, dédié aux bambous de Xuanzhou, à travers une description minutieuse de la nature et une personnification subtile, exprime son admiration pour la noblesse et la résistance inflexible, ainsi que sa détermination à ne pas suivre le courant.

Première strophe : « 小溪蓬底湖风重。吹破凝酥动。一枝斜映庾门深。 »
Xiǎo xī péng dǐ hú fēng zhòng. Chuī pò níng sū dòng. Yī zhī xié yìng yǔ mén shēn.

"Sous les roseaux près du ruisseau, le vent du lac est lourd ;
Il déchire la surface lactée, la faisant onduler.
Une tige se reflète obliquement dans la profondeur de la porte Yu."

Ces trois vers d'ouverture, à la fois description réaliste et mise en place atmosphérique, donnent une tonalité froide et solennelle à l'apparition du bambou. "Surface lactée" est une métaphore raffinée comparant le lac à du lait caillé, que le vent fait imperceptiblement frémir, suggérant élégance et sérénité. "Une tige se reflète obliquement" capture non seulement la beauté formelle du bambou, mais aussi son caractère noble et isolé, vivant retiré dans les profondeurs.

« 冷淡无言香泛、月华清。 »
Lěng dàn wú yán xiāng fàn, yuè huá qīng.

"Froid et silencieux, son parfum subtil se diffuse
Sous la clarté lunaire, limpide et pure."

Ici, le bambou est personnifié avec des traits de "froid et silencieux", incarnant une vertu discrète et non complaisante. Associé à "parfum subtil" et "clarté lunaire", cela crée une ambiance détachée et raffinée, comme si le bambou et la lune se répondaient dans une beauté transcendante.

Seconde strophe : « 已经轻瘦谁为共。魂绕徐熙□。 »
Yǐ jīng qīng shòu shuí wèi gòng. Hún rào xú xī □.

"Déjà mince et léger, qui pourrait l'accompagner ?
Mon âme enlace les bambous de Xu Xi."

"Minces et légers" décrit la silhouette élancée du bambou, évoquant aussi sa noblesse solitaire dans un environnement austère. "Les bambous de Xu Xi" font référence au célèbre peintre Xu Xi de l'époque des Tang du Sud, connu pour ses représentations de fleurs, d'oiseaux et surtout de bambous - une évocation artistique qui sert aussi de support émotionnel au poète.

« 耻同桃李困春容。肯向毫端开发、雨云中。 »
Chǐ tóng táo lǐ kùn chūn róng. Kěn xiàng háo duān kāi fā, yǔ yún zhōng.

"Il dédaigne, comme le pêcher et le prunier, d'être prisonnier des apparences printanières,
Préférant s'épanouir sous pluie et nuages, au bout du pinceau."

La conclusion utilise un contraste : "prisonnier des apparences printanières" dépeint les fleurs ordinaires dépendantes de la splendeur saisonnière, tandis que le bambou, toujours vert, brave pluie et vent, incarnant résistance et noblesse. "S'épanouir au bout du pinceau" évoque à la fois les bambous peints prenant vie sous la brosse, et la vitalité métaphorique du bambou comme esprit indépendant.

Lecture globale

Ce poème consacré aux bambous de Xuanzhou fusionne paysage réel, vision picturale et personnification. La première strophe décrit leur environnement et leur aura, avec vent, lac, lune et parfum créant une atmosphère noble et froide ; la seconde approfondit leurs vertus spirituelles - solitude altière et résistance ("minces et légers", "ne pas ressembler aux fleurs"), culminant avec l'image picturale qui élève le bambou du statut de plante à celui d'idéal humain. Paysages et sentiments s'entremêlent dans une esthétique à la fois sereine et puissante, reflétant les méditations tardives de Lü Benzhong sur l'intégrité et l'esprit.

Spécificités stylistiques

  • Allégorie végétale : Le bambou, miroir de l'âme du poète, incarne noblesse, fierté et indépendance.
  • Descriptions sensorielles raffinées : "Surface lactée", "clarté lunaire" offrent beauté visuelle et tactile.
  • Fusion poésie-peinture : La référence à Xu Xi enrichit l'œuvre d'une dimension picturale.
  • Contrastes significatifs : Bambou vs fleurs printanières souligne la persévérance et la constance.

Éclairages

À travers le bambou, ce poème transmet une philosophie existentielle : ne pas suivre le courant, ne pas dépendre des circonstances, ne pas être prisonnier des apparences éphémères, mais préserver son indépendance et sa pureté dans l'adversité. Pour l'homme moderne, l'esprit du bambou rappelle l'importance de garder son essence dans le tumulte, en cultivant une force intérieure durable. L'œuvre enseigne aussi que la beauté réside autant dans la retenue et la sérénité que dans l'éclat - comme le bambou, croissant silencieusement mais occupant pleinement son espace vital.

À propos du poète

Lv Benzhong

Lü Benzhong (吕本中 1084 - 1145), originaire de Shouxian dans l'Anhui, fut un éminent poète et érudit néoconfucéen sous la dynastie Song du Sud. Théoricien clé de l'École poétique du Jiangxi, il formula le concept de « méthode vivante » (huofa), prônant des variations naturelles dans le cadre des règles poétiques établies. Auteur de plus de 1 270 poèmes conservés, sa Généalogie de l'École poétique du Jiangxi (Jiangxi Shishe Zongpai Tu) établit Huang Tingjian comme patriarche du mouvement, influençant profondément la théorie poétique des Song et servant de pont entre l'École Jiangxi et les Quatre Maîtres de la Renaissance Song.

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À la Recherche du Printemps de Lü Benzhong
tan chun · lv ben zhong

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