Joie du Loriot : Brume et Vent de Feng Yansi

xi qian ying · wu meng meng
Brume flottante,
Vent murmurant.

Les saules portent des fumées légères,
Les duvets voltigent, remplissant le jardin du sud,
L’herbe au pied du mur s’étend dense et douce.

Les hirondelles commencent à voler,
Les loriots sont déjà vieux.

Le vent printanier caresse longuement le visage,
Si doux, si bon.

Rencontrons-nous, portons du vin,
Chantons à pleine voix —
La vie, combien en avons-nous ?

Poème chinois

「喜迁莺 · 雾濛濛」
雾濛濛,风淅淅。
杨柳带疏烟,飘飘轻絮满南园,墙下草芊绵。

燕初飞,莺已老。
拂面春风长好,相逢携酒且高歌,人生得几何。

冯延巳

Explication du poème

Ce poème lyrique (ci) fut composé par Feng Yansi, éminent ministre et poète des Tang du Sud durant la période troublée des Cinq Dynasties. Alors que le pouvoir des Tang du Sud déclinait face à la montée des Song du Nord, Feng Yansi, bien que talentueux, ne put inverser le cours de l'histoire. Dans ce contexte, il exprime à travers un style gracieux (wanyue) ses méditations sur la fugacité de la vie et les vicissitudes du temps. Cette œuvre, située dans un cadre printanier idyllique, incarne cette réflexion philosophique teintée de mélancolie et de résignation élégante.

Première strophe : « 雾濛濛,风淅淅。杨柳带疏烟,飘飘轻絮满南园,墙下草芊绵。 »
Wù méng méng, fēng xī xī. Yáng liǔ dài shū yān, piāo piāo qīng xù mǎn nán yuán, qiáng xià cǎo qiān mián.

"Brumes flottantes,
Vent murmurant.
Les saules portent une fumée légère,
Duvets voltigeants inondent le jardin méridional,
Au pied du mur, l'herbe s'étend dense et fine."

Cette strophe ouvre sur une scène matinale printanière, peignant un paysage naturel à la fois éthéré et tangible. Les "brumes flottantes" et le "vent murmurant" créent une atmosphère sensorielle complète, combinant visuel et auditif. Les saules enveloppés de "fumée légère" et les "duvets voltigeants" suggèrent une beauté transitoire, tandis que l'herbe "dense et fine" au pied du mur évoque une vitalité persistante. Ces images, d'une grande finesse picturale, établissent une ambiance printanière à la fois paisible et mélancolique.

Seconde strophe : « 燕初飞,莺已老。拂面春风长好,相逢携酒且高歌,人生得几何。 »
Yàn chū fēi, yīng yǐ lǎo. Fú miàn chūn fēng cháng hǎo, xiāng féng xié jiǔ qiě gāo gē, rén shēng dé jǐ hé.

"Les hirondelles prennent leur premier vol,
Les loriot sont déjà vieillissants.
La brise printanière caresse toujours aussi douce,
Rencontrons-nous, partageons vin et chantons à pleine voix -
Combien de telles occasions la vie nous offre-t-elle ?"

La strophe bascule de la contemplation à la réflexion existentielle. Le contraste entre "hirondelles prennent leur premier vol" et "loriot vieillissants" symbolise le passage inexorable du temps. Pourtant, "la brise printanière caresse toujours aussi douce" introduit une constante rassurante dans ce flux temporel. L'invitation à "partager vin et chanter" transforme la mélancolie en célébration de l'instant présent, tandis que la question rhétorique finale souligne la rareté précieuse de ces moments de joie partagée.

Lecture globale

Ce poème lyrique dépeint avec une touche fraîche et vivante les paysages printaniers d'un jardin. La première partie brosse un tableau pittoresque, tandis que la seconde chante des émotions lyriques, formant un tout cohérent où scènes et sentiments se fondent harmonieusement. Le poète déploie sa toile parmi les brumes, les saules et les chatons voltigeants, puis éveille des réflexions sur la vie à travers le vol des hirondelles et le chant des loriot, exprimant ainsi une double émotion de "nostalgie printanière mêlée de joie printanière".

Bien qu'apparemment descriptif de scènes printanières et de promenades, ce poème recèle en réalité une profonde compréhension de la brièveté de la vie et du flux des années. Feng Yansi, bien que maître du style gracieux et délicat (wanyue), allie ici élégance et hardiesse, révélant dans la tendresse une philosophie résignée, et dans la finesse une grandeur d'âme, démontrant ainsi sa méditation lucide et sa clairvoyance face à la nature, à la vie et aux vicissitudes du destin.

Spécificités stylistiques

  • Sentiments dans le paysage, fusion scène-émotion : À travers la description minutieuse d'images printanières comme brume, vent, saule et chatons, il construit un arrière-plan poétique, utilisant le vol des hirondelles et la maturité des loriot pour évoquer des réflexions sur le temps, intégrant naturellement l'émotion dans la peinture du paysage.
  • Contraste et transition habiles : La première strophe, calme et éthérée, contraste avec la seconde qui exprime directement les sentiments, passant progressivement du paysage à l'émotion, réalisant une transition entre grâce wanyue et hardiesse.
  • Langage clair et mélodieux : Les vers symétriques et la prosodie fluide possèdent une forte musicalité et qualité picturale, se lisant comme un ruisseau s'écoulant, doux à l'oreille.
  • Philosophie intégrée au quotidien : Apparemment décrivant une rencontre fortuite lors d'une promenade printanière, il révèle en réalité une compréhension profonde de la brièveté de la vie, riche en philosophie existentielle sans jamais devenir obscur.

Éclairages

Ce poème ne se contente pas de décrire la beauté des paysages printaniers, il aborde aussi le thème profond de la vieillesse inévitable et de la rareté des rencontres. À travers la transition naturelle entre brumes légères, saules et chatons voltigeants, hirondelles matinales et loriot tardifs, il éveille une mélancolie face à l'écoulement du temps et un éloge du moment présent. Feng Yansi y présente une attitude profonde face à la vie : tout en connaissant la brièveté de l'existence, il choisit néanmoins de "chanter en partageant le vin", de profiter de l'instant. Ce noyau spirituel, optimiste tout en restant lucide, généreux tout en gardant sa tendresse, nous enseigne à apprécier chaque beauté de la vie, à saisir les rencontres, à saisir l'instant présent, à saisir ce moment unique que "la vie nous offre combien de fois".

À propos du poète

Feng Yansi

Feng Yansi (冯延巳 903 - 960), prénom social Zhengzhong, originaire de Guangling (actuelle Yangzhou, Jiangsu), fut un célèbre poète de ci sous les Tang du Sud durant la période des Cinq Dynasties et Dix Royaumes. Nommé Vice-directeur gauche du Département des Affaires d'État (Zuo Puye Tongping Zhangshi), il jouit de la confiance absolue de l'empereur Li Jing. Ses ci tracèrent une nouvelle voie au-delà de la tradition Huajian, influençant directement des maîtres ultérieurs comme Yan Shu et Ouyang Xiu, jouant un rôle pivot dans la transition du ci d'"art des musiciens" vers "expression lettrée des fonctionnaires-érudits".

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