Sur le Fleuve de Kou Zhun

shu he shang ting bi · qiu
Je m’appuie seul sur la balustrade, ma pensée
S’allonge aussi loin que la rivière semée
De voiles. Au-delà de la forêt s’étend
La montagne couronnée du soleil couchant.

Poème chinois

「书河上亭壁 · 秋」
岸阔樯稀波渺茫,独凭危槛思何长。
萧萧远树疏林外,一半秋山带夕阳。

寇准

Explication du poème

Ce poème fait partie d'un tétralogie saisonnière ("Printemps", "Été", "Automne", "Hiver") composée par Kou Zhun et inscrite sur les murs d'un pavillon dominant le Fleuve Jaune. Le présent texte, dédié à l'automne, dépeint le paysage fluvial à cette saison tout en exprimant la solitude méditative du poète contemplant l'horizon.

Premier couplet : « 岸阔樯稀波渺茫,独凭危槛思何长。 »
Àn kuò qiáng xī bō miǎománg, dú píng wēi kǎn sī hé cháng.
La rive déploie son ampleur, les mâts se font rares, les flots s'estompent à l'infini ;
Seul, accoudé à la balustrade vertigineuse, que de pensées sans fin !

Le premier vers déploie une vision panoramique du Fleuve Jaune automnal : l'adjectif "ample" (阔) évoque l'immensité spatiale, "mâts rares" (樯稀) traduit l'abandon saisonnier, tandis que "flots infinis" (波渺茫) suggère la mélancolie temporelle. Le second vers introduit le poète dans ce paysage, où la posture solitaire ("accoudé à la balustrade") et les "pensées sans fin" créent un saisissant contraste entre l'éphémère humain et l'éternité fluviale.

Second couplet : « 萧萧远树疏林外,一半秋山带夕阳。 »
Xiāoxiāo yuǎn shù shū lín wài, yībàn qiū shān dài xīyáng.
Frémissements lointains des arbres au-delà du bois clairsemé ;
Une moitié de montagne automnale ceinte de lumière déclinante.

Ce couplet construit une perspective en profondeur : les arbres bruissant dans le lointain (萧萧远树) introduisent une note sonore et mélancolique, tandis que le "bois clairsemé" (疏林外) marque la transition visuelle vers la montagne automnale. L'image finale - "une moitié ceinte de lumière" - atteint une perfection symbolique : la division lumineuse reflète peut-être la dualité de l'âme poétique, partagée entre nostalgie et sérénité. Le couchant, en nimbeant seulement une partie du paysage, crée une tension visuelle qui métaphorise l'ambiguïté des sentiments.

Lecture globale

Ce poème prend pour toile de fond le fleuve Jaune en automne, fusionnant paysage et émotion. À travers des images comme « la rive immense », « les flots infinis » et « les mâts rares », il crée une atmosphère vaste et désolée, où la mélancolie automnale se mêle à une méditation intérieure. Le poète, appuyé sur la balustrade, contemple le soleil couchant sur le fleuve Jaune, projetant sa solitude et ses réflexions historiques sur le paysage naturel. Le vers final, « la moitié des montagnes dorée par le soleil déclinant », offre une image à la fois concise et évocatrice, dégageant une résonance infinie dans le silence. Le poème allie la grandeur des paysages, la mélancolie de l’automne et la profondeur des sentiments, formant une structure lyrique classique où « l’émotion s’incarne dans le paysage ».

Spécificités stylistiques

Ce poème se distingue par sa composition épurée, son atmosphère sublime et son langage concis mais puissant. Kou Zhun excelle à peindre de vastes paysages avec des mots simples, et le vers « la moitié des montagnes dorée par le soleil déclinant » est resté célèbre à travers les siècles pour sa fusion parfaite de la scène et de l’émotion, à la fois subtile et profonde. Le poème s’ouvre sur une description pour aboutir à une méditation lyrique, avec une narration discrète mais riche de sens, exprimant une réflexion à travers le paysage sans tomber dans la plainte explicite, révélant ainsi son calme intérieur et son esprit vaste, au-delà des tumultes politiques.

Éclairages

Ce poème nous enseigne que même face à un paysage désolé et une saison mélancolique, la nature peut inspirer des réflexions et des émotions profondes. Devant la majesté du fleuve Jaune et la beauté silencieuse des montagnes, le poète ne transmet pas seulement une tristesse personnelle, mais aussi une méditation intemporelle et une sérénité intérieure. C’est précisément dans l’immensité du ciel et de la terre, et dans le cycle des saisons, que le sens de la vie prend une dimension plus profonde.

Traducteur de poésie

Xu Yuanchong(许渊冲)

À propos du poète

Kou Zhun (寇准, 961 - 1023), originaire de Weinan dans le Shaanxi, était un homme politique et poète des Song du Nord. Reçu au concours impérial en 980, ses poèmes reflètent ses ambitions politiques, et son style poétique est à l’image de sa personnalité droite et intègre.

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