Regret Printanier de Liu Fangping

chun yuan liu fang ping
Hors de sa fenêtre, le soleil à son déclin,
Elle pleure inaperçue dans la salle dorée.
Dans la cour mute le printemp touche à sa fin,
Elle n ouvre pas sa porte aux fleurs tombées.

Poème chinois

「春怨」
纱窗日落渐黄昏,金屋无人见泪痕。
寂寞空庭春欲晚,梨花满地不开门。

刘方平

Explication du poème

Ce poème des Tang, œuvre emblématique de Liu Fangping sur le thème des regrets des courtisanes, dépeint avec une délicatesse mélancolique l'isolement d'une dame du palais délaissée, au crépuscule d'un printemps déclinant. À travers les jeux de lumière, le passage des saisons, la cour déserte et les pétales tombés, transparaissent non seulement la plainte personnelle de l'héroïne, mais aussi la douleur sourde du poète face à l'oppression sociale et aux caprices du destin.

Premier distique : « 纱窗日落渐黄昏,金屋无人见泪痕。»
Shā chuāng rì luò jiàn huáng hūn, jīn wū wú rén jiàn lèi hén.
Derrière la mousseline, le soleil décline vers le soir,
Dans la chambre dorée, nul ne voit la trace de mes pleurs.

Le premier vers « Derrière la mousseline… » (纱窗日落) saisit la transition lumineuse, utilisant l'image visuelle du crépuscule pour établir une atmosphère de solitude. L'adverbe « graduellement » (渐) rend palpable l'écoulement du temps et la pesanteur de l'âme, immergeant le lecteur dans la mélancolie vespérale.
Le second vers évoque par allusion la « chambre dorée » (金屋), jadis lieu des faveurs impériales, désormais vide de présence. « Traces de larmes » (泪痕) pointe avec pudeur une douleur si constante qu'elle en devient existence même. Ce contraste entre splendeur passée et abandon présent révèle l'évolution d'un ressentiment en douleur résignée.

Deuxième distique : « 寂寞空庭春欲晚,梨花满地不开门。»
Jì mò kōng tíng chūn yù wǎn, lí huā mǎn dì bù kāi mén.
Dans la cour déserte, le printemps décline,
Pétales de poiriers jonchant le sol - ma porte reste close.

« Cour déserte » (寂寞空庭) élargit l'espace de la détresse, de l'intérieur vers l'extérieur. La fin du printemps et la chute des fleurs de poirier (梨花) symbolisent le déclin conjoint de la jeunesse, de la beauté et des faveurs impériales. « Porte close » (不开门), négation apparemment simple, condense une émotion complexe : refus du monde extérieur ou renoncement à tout espoir. Cette porte verrouillée devient le sceau d'un cœur qui s'enferme avec sa peine.

Lecture globale

En quatre vers seulement se déploie le cheminement psychologique d'une dame de palais, de la plainte à l'affliction. Paysages saturés d'émotion, immobilité traversée de mouvements intérieurs. La structure claire progresse de l'intérieur au jardin, du temps qui passe à l'émotion qui creuse, du visuel crépusculaire à l'auditif silencieux. Chaque image reflète l'âme du personnage. Le poète, par son regard féminin subtil, révèle le tragique des femmes cloîtrées dans la Cité Interdite : compassion pour les délaissées, mais aussi écho de sa propre détresse. "Un être, un monde ; une scène, un sentiment" - fusion parfaite où le sens continue de résonner.

Spécificités stylistiques

Ce poème exprime une mélancolie profonde à travers des descriptions picturales et une structure savamment agencée. Le premier distique peint à la fois paysage et émotion : l'incipit crée une atmosphère, le second vers révèle le thème. Le distique suivant transforme l'émotion en paysage - les pétales tombés personnifiés, la "porte close" transmettant le sentiment par litote. Les images symboliques ("crépuscule", "printemps déclinant", "sol jonché de fleurs de poirier") dépassent la beauté saisonnière pour devenir des métaphores du destin. Le langage, délicat sans mièvrerie, et l'émotion, intense mais contenue, forgent un style où "le mouvement s'exprime par le calme, le sentiment par le paysage".

Éclairages

Ce poème dévoile non seulement le chagrin des femmes prisonnières du système féodal, mais aussi la lutte vaine contre le destin. Son écho contemporain reste puissant : derrière les apparences lumineuses, que de solitudes et de larmes invisibles ? À travers la plainte des dames de palais, le poète nous exhorte à cultiver une sensibilité pour les blessures cachées, tout en reconnaissant nos propres solitudes et espérances enfouies.

Traducteur de poésie

Xu Yuanchong(许渊冲)

À propos du poète

Liu Fangping (刘方平) est originaire de Luoyang. Il était doué pour peindre des paysages et écrire des poèmes, mais il n'a pas été reconnu tout au long de sa vie et a vécu reclus sur les rives des rivières Yingshui et Ruhe, et est resté inconnu jusqu'à la fin de sa vie.

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