La Branche du Piège : Où est la Nuée Vagabonde ? de Feng Yansi

que ta zhi · ji ri xing yun he chu qu
Où est donc passée la nuée vagabonde ces derniers jours ?
Elle a oublié de revenir, ignorant que le printemps touche à sa fin.

Sur les chemins de la Fête des Morts, cent herbes et mille fleurs,
À quel arbre est attaché son carrosse parfumé ?

Les yeux pleins de larmes, j’appuie seule sur la tour, répétant mes mots :
« Quand viennent les hirondelles, les avez-vous croisées sur le sentier ? »

Mon chagrin printanier s’embrouille comme les chatons de saule,
Dans mes rêves nostalgiques, nul lieu pour le retrouver.

Poème chinois

「鹊踏枝 · 几日行云何处去」
几日行云何处去?忘却归来,不道春将暮。
百草千花寒食路,香车系在谁家树?

泪眼倚楼频独语。双燕来时,陌上相逢否?
撩乱春愁如柳絮,依依梦里无寻处。

冯延巳

Explication du poème

Ce poème lyrique (ci) est l'œuvre de Feng Yansi, poète éminent des Tang du Sud, et compte parmi les chefs-d'œuvre du genre des "regrets féminins". À travers le profond attachement d'une femme pour son amant parti au loin et jamais revenu, il exprime l'état psychologique tourmenté et les émotions enchevêtrées propres à la fin du printemps. D'une conception subtilement enveloppante et d'un ton délicatement sinueux, avec des vers qui progressent en couches successives, ce poème représente une manifestation importante du style précoce et accompli de l'école gracieuse (wanyue).

Première strophe : « 几日行云何处去?忘却归来,不道春将暮。 »
Jǐ rì xíng yún hé chù qù ? Wàng què guī lái, bù dào chūn jiāng mù.

"Où es-tu allé ces jours-ci, tel un nuage errant ?
Tu as oublié de revenir,
Ne vois-tu pas que le printemps touche à sa fin ?"

Dès l'ouverture, une question rhétorique introduit une tonalité de reproche. "Nuage errant" est une métaphore de l'homme qui vagabonde au loin sans retour, léger et inconstant ; "Ne vois-tu pas que le printemps touche à sa fin" joue sur un double sens : évoquant à la fois la fin des jours printaniers et suggérant le déclin de la jeunesse de la femme, ce qui inspire la tristesse. Ces trois vers, d'un seul élan, voient le sentiment s'acheminer progressivement vers l'affliction.

« 百草千花寒食路,香车系在谁家树? »
Bǎi cǎo qiān huā hán shí lù, xiāng chē xì zài shuí jiā shù ?

"Sur les chemins de la fête de Hanshi, cent herbes et mille fleurs,
À l'arbre de quelle maison ton chariot parfumé est-il attaché ?"

"Cent herbes et mille fleurs" dépeint en surface une splendeur printanière, mais cache en réalité une nuance de sarcasme, sous-entendant les femmes des lieux de plaisir dans ce monde bigarré. "À l'arbre de quelle maison ton chariot parfumé est-il attaché", avec retenue, interroge sur la possibilité que l'homme s'attarde ailleurs, écrit de manière implicite mais pleine de ressentiment.

Seconde strophe : « 泪眼倚楼频独语。双燕来时,陌上相逢否? »
Lèi yǎn yǐ lóu pín dú yǔ. Shuāng yàn lái shí, mò shàng xiāng féng fǒu ?

"Les yeux en larmes, appuyée au pavillon, je me parle souvent à moi-même.
Quand les hirondelles reviennent par deux,
Les as-tu rencontrées sur le chemin ?"

"Yeux en larmes", "appuyée au pavillon", "je me parle souvent à moi-même" : ces trois expressions peignent ensemble la douleur de la femme. Les hirondelles qui reviennent chaque année symbolisent une affection inchangée, tandis que l'homme reste sans nouvelles ; la femme n'a d'autre choix que d'interroger avec naïveté les hirondelles, ce qui rend le sentiment encore plus pathétique et souligne son isolement et son désarroi.

« 撩乱春愁如柳絮,依依梦里无寻处。 »
Liáo luàn chūn chóu rú liǔ xù, yī yī mèng lǐ wú xún chù.

"Le chagrin printanier, désordonné comme les chatons de saule voltigeants,
Dans un rêve nostalgique, nulle part où te trouver."

"Chagrin printanier désordonné" s'associe parfaitement à "chatons de saule", les tourments étant comme les chatons, flottants et insaisissables. "Nostalgique" montre qu'elle reste attachée même en rêve, tandis que "nulle part où te trouver" révèle que l'amant a disparu sans laisser de trace, définitivement introuvable. Ces deux vers finaux épuisent la douleur de la nostalgie, touchants et mélancoliques.

Lecture globale

Le poème tout entier se développe autour du thème "attendre en vain le retour de l'être aimé". L'émotion passe de l'attente à la déception, de l'illusion au rêve, du ressentiment au chagrin, progressant par couches. Feng Yansi excelle à utiliser des techniques telles que les questions rhétoriques, les comparaisons et les symboles, donnant au poème une structure rigoureuse, un rythme lent mais sinueux. La femme, tout en reprochant à son amant de ne pas revenir, ne peut se résoudre à abandonner leur ancien amour, plongée toute la journée dans la "tristesse", l'"attente", la "nostalgie" et les "rêves", avec une émotion sincère et un langage raffiné.

Trois questions rhétoriques en particulier :

  • "Où es-tu allé ces jours-ci, tel un nuage errant ?"
  • "À l'arbre de quelle maison ton chariot parfumé est-il attaché ?"
  • "Les as-tu rencontrées sur le chemin ?"

Intensifient progressivement l'émotion, faisant passer la femme de l'espoir au ressentiment, puis du ressentiment à la douleur, sublimant pas à pas l'émotion, ce qui constitue une caractéristique majeure du poème.

Spécificités stylistiques

  • Structure rigoureuse, progression émotionnelle par couches : Crée un processus allant de l'attente à la désillusion à travers trois questions rhétoriques.
  • Métaphores riches, images typiques : "Nuage errant", "chariot parfumé", "hirondelles par deux", "chatons de saule" sont des images vives, porteuses d'une signification profonde.
  • Langage sinueux, tonalité murmurante : Utilise avec habileté un vocabulaire délicat et un ton enveloppant pour créer une atmosphère de ressentiment féminin dans le gynécée.
  • Fusion scène-sentiment, combinaison réel-irréel : Les soliloques réels devant le pavillon et les recherches oniriques se répondent, renforçant le pouvoir d'évocation artistique.

Éclairages

Cette œuvre ne représente pas seulement la douleur d'un amour individuel, mais exprime aussi les états d'esprit universellement présents dans les émotions humaines que sont "l'attente", le "ressentiment", l'"attachement" et les "rêves". Elle transmet une sensibilité mélancolique profonde mais maîtrisée, permettant d'apprécier la beauté de la poésie gracieuse tout en approfondissant la compréhension de la fragilité et de la ténacité de la nature humaine. Ce mode d'expression délicat et profond constitue un charme important de la poésie traditionnelle, qui touche le cœur.

À propos du poète

Feng Yansi

Feng Yansi (冯延巳 903 - 960), prénom social Zhengzhong, originaire de Guangling (actuelle Yangzhou, Jiangsu), fut un célèbre poète de ci sous les Tang du Sud durant la période des Cinq Dynasties et Dix Royaumes. Nommé Vice-directeur gauche du Département des Affaires d'État (Zuo Puye Tongping Zhangshi), il jouit de la confiance absolue de l'empereur Li Jing. Ses ci tracèrent une nouvelle voie au-delà de la tradition Huajian, influençant directement des maîtres ultérieurs comme Yan Shu et Ouyang Xiu, jouant un rôle pivot dans la transition du ci d'"art des musiciens" vers "expression lettrée des fonctionnaires-érudits".

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