Éclaircie Impériale de Yu Shinan

chu qing ying jiao
Premier soleil illumine le pavillon des Hirondelles,
Nouveaux ruissellements emplissent l'étang aux Ponts.

Nuages qui s'en retournent, à moitié absorbés par les collines,
Dernières gouttes suspendues encore aux branches.

Poème chinois

「初晴应教」
初日明燕馆,新溜满梁池。
归云半入岭,残滴尚悬枝。

虞世南

Explication du poème

Ce poème est une œuvre de circonstance, ce que l'on appelle "répondre à un ordre" (应教), c'est-à-dire composé sur ordre de l'empereur. Sous les Tang, les salons littéraires de cour étaient en vogue, et les souverains commandaient souvent à leurs proches ministres des poèmes pour commémorer des événements ou décrire des paysages. « Élégant après la pluie, sur ordre impérial » (初晴应教) dépeint une scène après la pluie, au moment où le temps s'éclaircit : le soleil matinal luit, le palais et ses jardins sont rafraîchis, les nuages regagnent les montagnes, des gouttes perlent encore aux branches. D'une touche concise et élégante, le poète saisit la beauté fraîche et changeante de la nature. Bien que composé sur ordre, le poème s'accorde avec le style « pur et élégant » (清雅) caractéristique de Yu Shinan.

Premier couplet : « 初日明燕馆,新溜满梁池。 »
Chū rì míng yàn guǎn, xīn liū mǎn liáng chí.
Le soleil naissant illumine le pavillon aux Hirondelles ;
Les nouveaux filets d'eau ont rempli l'étang aux Liang.

« Soleil naissant » (初日) indique le moment, juste après la pluie, à l'aube ; « Pavillon aux Hirondelles » (燕馆) désigne les résidences du palais ou du jardin, évoquant aussi un présage de paix. L'eau de pluie a rempli l'étang, reflétant une atmosphère de fraîcheur. Ce couplet joue sur la lumière et l'eau, dépeignant la clarté qui suit la pluie. La lumière et l'humidité se reflètent l'une l'autre, créant une ambiance à la fois paisible et pleine de vie.

Deuxième couplet : « 归云半入岭,残滴尚悬枝。 »
Guī yún bàn rù lǐng, cán dī shàng xuán zhī.
Les nuages qui retournent pénètrent à moitié les montagnes ;
Les gouttes résiduelles pendent encore aux branches.

« Nuages qui retournent » (归云) dépeint les nuages résiduels se dirigeant vers les montagnes, mêlant mouvement et calme ; « gouttes résiduelles » (残滴) décrit les gouttes d'eau encore accrochées aux branches, avec une vivacité minutieuse. Ce couplet combine le proche et le lointain : au loin, les montagnes baignées de brume nuageuse ; au premier plan, l'étincellement des gouttes sur les branches. Les éléments sont distincts, offrant à la fois la fraîcheur vivante après la pluie et le calme profond de la nature.

Lecture globale

Bien que ce poème ne compte que vingt caractères, il construit une scène complète après l'averse. Le premier vers évoque la lumière et l'humidité, l'accent étant mis sur l'ambiance générale ; le second vers décrit les nuages qui se retirent et les gouttes résiduelles, se concentrant sur les détails. Les montagnes lointaines et les branches proches, l'ombre des nuages et les gouttes de pluie se répondent, formant une image à la fois claire et éthérée. En tant qu'œuvre de circonstance, bien qu'il n'y ait pas d'éloge direct de l'empereur, le poème suggère, à travers la scène de l'éclaircie, l'idée d'un « renouveau universel » (万象更新), correspondant à la louange par la cour de l'harmonie et de la clarté. Son langage est simple mais son atmosphère est profonde, reflétant le style artistique « paisible et élégant » (冲淡而雅) de Yu Shinan.

Spécificités stylistiques

  • Une petite scène, une grande signification : En seulement deux couplets, sont évoqués le soleil naissant éclatant, les gouttes résiduelles et les nuages qui se retirent ; les éléments sont menus, mais l'ambiance est vaste.
  • Combinaison du lointain et du proche : Les montagnes et les branches, les nuages et les gouttes de pluie sont distincts, créant une image en relief.
  • Harmonie du mouvement et de l'immobilité : L'écoulement des nuages et l'immobilité des gouttes se reflètent, enrichissant l'image poétique.
  • Pureté simple et élégance : Le langage, sans artifice, est frais et naturel, très visuel, incarnant le style « pur et élégant » de Yu Shinan.

Éclairages

Ce petit poème nous apprend que le moment le plus touchant de la nature se situe souvent juste après l'averse. Alors, le ciel et la terre sont clairs, les nuages regagnent les montagnes, les gouttes d'eau sont cristallines, et les dix mille êtres sont rafraîchis. Il en va de même pour la vie : après les difficultés, si l'on peut garder l'esprit clair et serein, on pourra apprécier la quiétude et l'espoir de « l'éclaircie ». En saisissant les infimes changements de la nature, le poète nous fait comprendre que la beauté de l'existence réside souvent dans l'instant fugace, et que l'essentiel est de savoir la percevoir avec le cœur.

À propos du poète

Yu Shinan

Yu Shinan (虞世南 558 - 638), originaire de Yuyao dans la province du Zhejiang, fut un éminent homme d’État, écrivain, calligraphe et politicien durant l’ère Zhenguan des débuts de la dynastie Tang. Il figurait parmi les « Vingt-Quatre Officiers Méritants du Pavillon Lingyan » et occupa le poste de Directeur de la Bibliothèque impériale. Sa calligraphie lui valut d’être compté parmi les « Quatre Grands Calligraphes des Débuts des Tang » aux côtés d’Ouyang Xun, de Chu Suiliang et de Xue Ji. Dans le domaine poétique, il perpétua la tradition de Xu Ling et initia un style courtois raffiné, équilibré et harmonieux. Il compila également les Extraits des Livres du Hall Nord(Beitang Shuchao), établissant un nouveau genre de littérature encyclopédique.

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