La Pavillon des Hirondelles III de Zhang Zhongsu

yan zi lou iii
Elle a vu revenir du nord les oies sauvages,
Et voit voler les hirondelles printanières.
Elle ne veut jouer de la flûte davantage,
Couverte de toile d’araignée et de pousière.

Poème chinois

「燕子楼 · 其三」
适看鸿雁洛阳回,又睹玄禽逼社来。
瑶瑟玉箫无意绪,任从蛛网任从灰。

张仲素

Explication du poème

Dernier poème de la trilogie, il prolonge la mélancolie des œuvres précédentes en évoquant les changements saisonniers. Partant du retour des oies sauvages à Luoyang et des hirondelles au pavillon, le poème, touché par ces scènes, glisse vers une méditation sur sa propre condition. D'une écriture subtile et retenue, il dépeint l'âme profonde de Guan Panpan, hantée par le regret d'une jeunesse perdue.

Premier distique : « 适看鸿雁洛阳回,又睹玄禽逼社来。»
shì kàn hóngyàn Luòyáng huí, yòu dǔ xuán qín bī shè lái.
À peine ai-je vu les oies sauvages revenir de Luoyang,
Que j'aperçois déjà les hirondelles noires arriver pour le sacrifice printanier.

Cette strophe capte le flux temporel pour réveiller des souvenirs douloureux. Les "oies sauvages" (鸿雁) venant de Luoyang - où repose Zhang Yin - portent une charge affective, tandis que les "hirondelles noires" (玄禽), arrivant en couple pour les rites printaniers, contrastent cruellement avec la solitude de Panpan. Ce jeu entre migrations aviaires et cycles rituels inscrit l'écoulement du temps dans le récit émotionnel.

Deuxième distique : « 瑶瑟玉箫无意绪,任从蛛网任从灰。»
yáo sè yù xiāo wú yì xù, rèn cóng zhū wǎng rèn cóng huī.
Luth de jade et flûte de marbre n'éveillent plus rien en moi,
Livrés aux toiles d'araignée, abandonnés à la poussière.

Ici, l'abandon des instruments de musique (瑶瑟玉箫) - symboles d'une vie artistique révolue - traduit un deuil intérieur. La répétition de "livrés/abandonnés" (任从) scelle une résignation active. Les "toiles d'araignée" et la "poussière" deviennent les chroniqueurs silencieux d'une fidélité obstinée à travers les années.

Lecture globale

Le poème naît de la mutation des saisons pour évoquer souvenirs et soupirs, tissant entre les oies sauvages d'automne et les hirondelles printanières un contraste spatio-temporel profond : d'un côté, les oies automnales n'apportant nulle nouvelle du défunt ; de l'autre, les hirondelles revenues par couples au printemps ne faisant qu'accentuer la solitude. Se mêlent ici la douloureuse nostalgie du disparu et le lament sur la jeunesse enfuie. D'une apparente froideur descriptive, l'émotion y est pourtant profonde. Les deux derniers vers, sans mention explicite de tristesse, en disent plus que des pleurs, substituant aux affects des images concrètes qui campent avec une force bouleversante le portrait de Panpan, solitaire mais fidèle. D'un langage sobre mais chargé de sentiment, d'une subtilité pleine de grâce, ce poème possède une rare puissance évocatrice.

Spécificités stylistiques

  • Fusion du sentiment et du paysage, entrelacs de réel et d'imaginaire : Les deux premiers vers, dépeignant l'alternance des saisons, projettent en réalité les émotions intérieures, unifiant paysage et état d'âme.
  • Art symbolique, riche de sens : Le luth de jade et la flûte de marbre, naguère instruments de musique raffinée, laissés à la poussière et aux toiles d'araignée, symbolisent la perte des beautés de l'existence et leur oubli progressif.
  • Structure habile, progression émotionnelle : Passant du paysage au sentiment, de l'extérieur à l'intérieur, le poème dévoile couche après couche l'état d'esprit de Panpan après dix ans de veuvage, laissant une résonance infinie.

Éclairages

Ce troisième poème, à travers le prisme des saisons, explore les profondeurs des sentiments humains. Les cycles naturels - retour du printemps, départ de l'automne, arrivée des hirondelles, migration des oies - deviennent prétextes à évoquer la mémoire du défunt et une lucide conscience du destin personnel. Sans jamais exprimer directement sa douleur, Guan Panpan y incarne une résistance silencieuse au bruit du monde, une fidélité obstinée face aux leurres de l'existence, suscitant une profonde admiration. Le poème nous enseigne que la véritable constance ne réside pas dans les apparences, mais dans cette persistance du cœur et des convictions à travers les intempéries du temps. Derrière sa quiétude apparente se tapit une force affective d'autant plus puissante qu'elle est silencieuse et endurante.

Traducteur de poésie

Xu Yuanchong(许渊冲)

À propos du poète

Zhang Zhongsu (张仲素), vers 769 - 819 après J.-C., était un poète de la dynastie Tang, originaire de Suzhou, dans la province de l'Anhui, et diplômé en 798. Zhang Zhongsu s'est spécialisé dans les poèmes lefu, et était doué pour décrire l'état d'esprit d'une femme pensante. Il a également écrit quelques poèmes frontaliers qui glorifiaient l'esprit combatif des gardes-frontières.

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