Début du Printemps de Lu Guimeng

zao chun · lu gui meng
La pluie froide n'ajoute qu'une chaleur illusoire,  
La brume naissante refuse de parer le printemps.

Quelques branches portent des fleurs timides,
Accablant de tristesse le gardien des parfums.

Poème chinois

「早春」
雨冷唯添暑,烟初不著春。
数枝花颣小,愁杀扈芳人。

陆龟蒙

Explication du poème

À cette époque trouble où les mœurs se corrompaient et l'obscurité politique régnait, les poètes se tournaient vers les paysages, excellant à décrire et exprimer leurs sentiments à travers des détails infimes. Lu Guimeng, déçu toute sa vie par sa carrière, trouvait refuge dans les paysages du Jiangnan, exprimant souvent ses aspirations à travers la nature. Cette œuvre décrit le climat et les scènes du début du printemps : bien que vibrant de vie, le froid persiste, reflétant la mélancolie intérieure du poète.

Premier distique : « 雨冷唯添暑,烟初不著春。 »
Yǔ lěng wéi tiān shǔ, yān chū bù zhù chūn.
"La pluie froide n'ajoute que chaleur étouffante ;
La brume naissante ne porte pas encore le printemps."

Ces deux vers dépeignent directement les caractéristiques climatiques du début du printemps. Le redoux hésitant, la pluie froide trempe les vêtements, l'essence printanière est là mais pas encore prononcée. "N'ajoute que" (唯添) souligne l'inconfort apporté par la pluie froide ; "ne porte pas encore le printemps" (不著春) accentue la sensation de printemps incomplet. Au-delà de la description paysagère, cela reflète la déception du poète face à un printemps tardif.

Second distique : « 数枝花颣小,愁杀扈芳人。 »
Shù zhī huā lèi xiǎo, chóu shā hù fāng rén.
"Quelques branches de boutons floraux encore petits ;
Navrent à mort celui qui veille sur leur parfum."

Ces deux vers passent du climat à la flore, dépeignant davantage la subtilité printanière. Les boutons floraux apparaissent mais sont clairsemés et chétifs, sans magnificence encore. Le poète utilise "navrent à mort" (愁杀) pour exprimer ce sentiment de perte déconcertante : pour qui aime le printemps, voir cela ajoute de la mélancolie. Le poète projette son propre désappointement dans la flore, transmettant implicitement ses sentiments intérieurs.

Lecture globale

Ce poème décrit le froid et le printemps incomplet du début de saison. Le premier distique évoque pluie froide et brume légère, le printemps peu visible ; le second, des boutons floraux clairsemés et chétifs, le printemps subtil. Bien que de vingt caractères seulement, le poème progresse par couches, du climat à la flore, de la pluie froide à la mélancolie, montrant le tableau d'un monde pas encore florissant au début du printemps.

Lu Guimeng excellait à placer de profondes émotions dans de petits paysages. Le printemps sous sa plume n'est pas fraîcheur et luminosité pures, mais teinté de la mélancolie du retard. En réalité, cela reflète précisément la condition intérieure du poète, talent incompris et idéaux non réalisés. Le printemps tardif et les entraves du destin du poète se répondent secrètement, faisant que le poème, bien que descriptif, transpire partout le sentiment d'une vie contrariée.

Spécificités stylistiques

  • Expression des sentiments through le paysage
    Le poète utilise pluie froide, brume légère et boutons chétifs pour montrer le printemps incomplet, exprimant ainsi sa déception et ses sentiments intérieurs. C'est l'approche courante des lettrés de la fin des Tang : "exprimer ses sentiments through le paysage".
  • Délicatesse et vivacité
    Des mots comme "n'ajoute que" (唯添), "ne porte pas encore" (不著), "petits" (小) transmettent précisément l'état printanier non abouti, délicat et vivant.
  • Voir le grand dans le petit
    Sans décrire de vastes scènes printanières, mais through quelques détails — pluie froide, brume légère, quelques petits boutons —, il transmet avec précision l'atmosphère du début du printemps et l'état d'âme du poète.
  • Langage concis et implicite
    Le poème est bref et condensé, direct mais profondément significatif. Surtout "navrent à mort" (愁杀), qui exprime parfaitement le conflit intérieur du poète entre amour du printemps et déception.
  • Fusion paysage-émotion
    Paysage extérieur et sentiments intérieurs étroitement liés, donnant au poème, bien que descriptif, une profonde saveur existentielle.

Éclairages

Cette œuvre nous apprend que la saison de renaissance n'est pas toujours joyeuse, elle peut s'accompagner de froid et de déception. La vie est ainsi : idéal et réalité ont souvent un écart, l'incompréhension du talent apporte inévitablement de la mélancolie. Mais comme le printemps finira par fleurir, la vie a aussi ses tournants. Le poète, en un petit poème, exprime l'interconnection entre vie et nature, nous rappelant de garder patience et résilience face à l'espoir tardif.

À propos du poète

Lu Guimeng

Lu Guimeng (陆龟蒙 ?- c. 881 apr. J.-C.) , Écrivain et agronome de la fin de la dynastie Tang, originaire de Suzhou dans le Jiangsu. Après avoir échoué à l'examen impérial jinshi, il se retira à Puli (Songjiang) où il forma un célèbre duo littéraire avec Pi Rixiu, connu sous le nom de "Pi-Lu". Sa poésie, souvent satirique envers les réalités sociales, se caractérise par une clarté austère et une élégance sobre. Inscrit dans le Recueil des Talents Poétiques des Tang, Lu Xun qualifia ses essais de "lueur et tranchant au milieu d'un bourbier confus", faisant de lui une voix unique dans le paysage littéraire de la fin des Tang.

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