Fierté des Pêcheurs : Printemps dans la Cour de Lü Benzhong

yu jia ao · xiao yuan you you chun wei yuan
Dans la petite cour paisible, le printemps n’est pas encore loin,
Les pivoines, hier écloses, montrent encore leur teinte pâle.

Vous avez pris soin, cher hôte, de relever tous les rideaux,
Le vent tournoie,
L’ombre verte des arbres caresse la balustrade au crépuscule.

Je me souviens des nuits claires d’autrefois, trop brèves,
À Luoyang, les nouvelles des fleurs m’accompagnaient souvent.

Une seule pivoine Yao Huang ornait mes cheveux,
Mais mes sentiments restaient enfermés.
Aujourd’hui, vieilli et malade, personne ne prend soin de moi.

Poème chinois

「渔家傲 · 小院悠悠春未远」
小院悠悠春未远。牡丹昨夜开犹浅。
珍重使君帘尽卷。风欲转。绿阴掩映栏干晚。

记得旧时清夜短。洛阳芳讯时相伴。
一朵姚黄?髻满。情未展。新来衰病无人管。

吕本中

Explication du poème

Ce poème lyrique (ci) de style "Fierté du pêcheur" (渔家傲) fut composé sous la dynastie des Song du Sud, bien que sa date exacte reste inconnue. De par son ton, il semble avoir été écrit par Lü Benzhong dans ses dernières années ou durant ses voyages. À cette époque troublée des Song du Sud, marquée par l'instabilité politique, le poète, déjà âgé et affaibli par la maladie, dépeint dans cette œuvre à la fois des paysages printaniers et des pivoines, évoque des souvenirs de nuits paisibles et de nouvelles florales de Luoyang, tout en exprimant sa solitude actuelle et ses souffrances physiques. Le vers "vieilli et malade, personne ne s'occupe de moi" révèle crûment l'isolement de ses dernières années, empreint d'une profonde autocompassion et résignation, reflétant tant sa situation personnelle que l'impuissance et le déclin des lettrés dans une époque chaotique.

Première strophe : « 小院春深春未远。牡丹昨夜开犹浅。珍重使君帘尽卷。风欲转。绿阴掩映栏干晚。 »
Xiǎo yuàn chūn shēn chūn wèi yuǎn. Mǔ dān zuó yè kāi yóu qiǎn. Zhēn zhòng shǐ jūn lián jǐn juǎn. Fēng yù zhuǎn. Lǜ yīn yǎn yìng lán gān wǎn.

"Dans la petite cour, le printemps profond n'est pas encore loin ;
Les pivoines, écloses hier, montrent encore des teintes pâles.
Le vénérable seigneur a soigneusement relevé tous les rideaux ;
Le vent s'apprête à tourner.
L'ombre verte tamise la balustrade à la tombée du soir."

La strophe s'ouvre sur une scène printanière dans une cour intime, où les pivoines à peine écloses symbolisent une beauté naissante et éphémère. "Relever les rideaux" suggère une ouverture au paysage, tandis que "le vent s'apprête à tourner" et "la tombée du soir" introduisent subtilement une mélancolie face au temps qui passe, créant une atmosphère paisible mais teintée de nostalgie.

Seconde strophe : « 记得旧时清夜短。洛阳芳讯时相伴。一朵姚黄?髻满。情未展。新来衰病无人管。 »
Jì dé jiù shí qīng yè duǎn. Luò yáng fāng xùn shí xiāng bàn. Yī duǒ yáo huáng? Jì mǎn. Qíng wèi zhǎn. Xīn lái shuāi bìng wú rén guǎn.

"Je me souviens des nuits claires et trop brèves d'autrefois,
Accompagné alors des nouvelles florales de Luoyang.
Une pivoine Yao Huang ornait-elle mes cheveux ?
Les sentiments restèrent inachevés.
Dernièrement, vieilli et malade, personne ne s'occupe de moi."

La seconde strophe plonge dans les souvenirs, où "les nouvelles florales de Luoyang" et la "pivoine Yao Huang" (variété noble de pivoine) symbolisent la splendeur passée et les relations précieuses. "Les sentiments restèrent inachevés" révèle une relation interrompue ou inexprimée, tandis que le vers final, brutal dans sa simplicité, expose la solitude et la détresse physique du poète dans son grand âge.

Lecture globale

Ce poème utilise les paysages printaniers et les pivoines comme passerelles entre le présent et les souvenirs. La première strophe, avec son printemps "pas encore loin" et ses pivoines "aux teintes pâles", exprime une appréciation subtile de la beauté transitoire. La seconde strophe, évoquant les splendeurs de Luoyang et les sentiments inachevés, contraste avec la réalité actuelle de maladie et d'isolement. La structure passe habilement de la description à la réflexion, culminant dans l'aveu poignant de négligence dans la vieillesse.

Spécificités stylistiques

  • Transition paysage-émotion : Les images naturelles (pivoines, vent, ombre verte) servent de métaphores aux états émotionnels.
  • Économie narrative : En quelques vers, le poème traverse les temporalités (présent, souvenir, présent) avec une efficacité remarquable.
  • Symbolisme floral : Les pivoines, surtout la variété Yao Huang, incarnent la mémoire des jours fastes.
  • Contraste poignant : La beauté des souvenirs accentue l'amertume du présent.

Éclairages

Cette œuvre rappelle avec élégance que les moments de grâce sont éphémères, et que les relations humaines, souvent laissées inachevées, deviennent sources de mélancolie avec l'âge. Elle enseigne à chérir les compagnonnages avant que ne vienne le temps où "personne ne s'occupe de moi". Dans sa franchise sur la vieillesse et la maladie, le poème transcende les siècles pour parler à notre condition humaine universelle, tout en célébrant la persistance de la mémoire et la résilience trouvée dans la beauté naturelle.

À propos du poète

Lv Benzhong

Lü Benzhong (吕本中 1084 - 1145), originaire de Shouxian dans l'Anhui, fut un éminent poète et érudit néoconfucéen sous la dynastie Song du Sud. Théoricien clé de l'École poétique du Jiangxi, il formula le concept de « méthode vivante » (huofa), prônant des variations naturelles dans le cadre des règles poétiques établies. Auteur de plus de 1 270 poèmes conservés, sa Généalogie de l'École poétique du Jiangxi (Jiangxi Shishe Zongpai Tu) établit Huang Tingjian comme patriarche du mouvement, influençant profondément la théorie poétique des Song et servant de pont entre l'École Jiangxi et les Quatre Maîtres de la Renaissance Song.

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